Ramon by Fernandez Dominique

Ramon by Fernandez Dominique

Auteur:Fernandez, Dominique [Fernandez, Dominique]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Française
Éditeur: Chocomousse - TAZ
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Mon père ne s’en tient pas à ces réunions et colloques. A titre individuel, il conduit plus loin la bataille, en publiant dans le numéro d’avril de La Nouvelle Revue Française la fameuse « Lettre ouverte à André Gide ».

« Mon cher ami, Vous êtes communiste et je ne le suis pas encore ; et je persiste à croire que mieux vaut “ne l’être pas” encore quand on veut servir, de la place où je suis, les intérêts essentiels du prolétariat. » L'important, c’est de comprendre qu’il y a des moments, dans la vie publique, « où l’on se voit forcé de prendre position afin de sauver son honneur d’homme ». Et d’expliquer les trois raisons qui l’empêchaient d’adhérer au communisme, trois raisons, dont les deux premières n’existent plus, alors que la troisième subsiste. La première, c’est le caractère rigide de la doctrine de Marx, au détriment des droits de la critique. Mais aujourd’hui, « le redressement farouche et fou du capitalisme a cette conséquence que le marxisme, vaille que vaille, est devenu l’unique rempart des opprimés, je veux dire simplement de ceux qui ont faim. Dès lors, toute critique du marxisme se change automatiquement en argument de “droite”. Or, il me paraît infiniment plus important de défendre ceux qui ont faim que d’avoir raison contre Marx ». Jean-Paul Sartre, il me semble, quand il s’interdisait, après la guerre, de désespérer les ouvriers de Boulogne-Billancourt par des critiques contre le marxisme, qu’a-t-il fait d’autre que de plagier et lester du plomb de la hargne ces phrases de mon père ? « Un anticommuniste est un chien, je ne sors pas de là, je n’en sortirai plus jamais. » (Situations IV.)

Deuxième raison : la conviction que l’adhésion au communisme comporte une action de tous les instants, un dévouement total à la cause, et que lui, Ramon Fernandez, ne voulait pas renoncer à ses travaux personnels. « Aujourd’hui, c’est différent, parce que toute absence dans le camp du prolétariat suscite une présence dans le camp de ses ennemis. Il y a plus. Quand on défend comme moi un certain humanisme, fondé sur la croyance que l’homme est pour l’homme la plus haute valeur, et que l’humanité ne sera point égale à elle-même tant que les hommes ne seront pas humains, on ne saurait laisser triompher les gens qui pensent exactement le contraire sans encourir ce déshonneur philosophique qui est peut-être le plus amer de tous les déshonneurs. » Je suis ému et stupéfait de lire de telles lignes, ainsi que celles qui suivent : « L'asservissement qui nous menace ne sera pas seulement économique. On veut nous encadrer et nous subordonner : nous encadrer dans des institutions condamnées par l’esprit ; nous subordonner à quelque principe transcendant, Dieu ou nation, qui réglerait la pensée de la pensée même et imposerait ses mots d’ordre à l’inspiration. » Comment l’homme aussi lucide et bon serviteur de l’esprit en 1934 en arrivera-t-il, trois ans plus tard, à se laisser « encadrer », « subordonner »



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.